Les violons ont une âme...

Anne Sophie Mutter est magique...
Je ne sais pas si vous avez regardé le concert de ce soir sur Arte diffusé pour le centième anniversaire de la naissance de Herbert Von Karajan mais je voulais vous dire que j'ai été subjugué par l'interprétation absolument féérique qu'elle nous a donné du concerto pour violon en ré majeur opus 61 de Ludwig Von Beethoven avec le Berliner Philarmoniker sous la direction de S. Osawa.

Je n'ai jamais entendu un stradivarius chanter de telle façon, elle ne joue pas on dirait que son violon est ensorcelé et qu'elle se contente de le caresser.

J'en ai encore les larmes aux yeux.

En bis elle a donné une sarabande de Bach absolument sublime et l'orchestre, de vieux routards de la musique pourtant, était absolument subjugué.

Avec une nana comme ça (elle est née en 1963) qui sait si bien faire sortir l'âme de la musique on finirait par croire en Dieu.

Une petite note technique pour ceux que le sujet ne rebute pas :
J'ai fait une petite écoute comparative entre la prestation musicale offerte par Arte sur la TNT comparée à Arte France diffusé par CanalSat et Arte Allemagne sur le même satellite.

Sur la TNT on a du 16:9 natif (bonne image) mais un son voilé avec des aigus pas trop bien définis.
Dans les forte de l'orchestre il y'a peu d'étagement en profondeur des plans sonores on entend bien que pour mettre un maximum de chaînes par multiplex l'audio est étriqué avec un débit de 192 kbits/s.

Sur Arte France via CanalSat on a une image en 4:3 qu'il faut zoomer pour remplir l'écran et qui devient donc mauvaise. Le son est beaucoup plus clair que sur la TNT et on entend bien l'apport d'un débit audio porté à 256 kbits/s.

Sur Arte Allemagne l'image (tournée en HD pour tout le monde) est en 16:9 natif mais grâce au débit vidéo supérieur elle est mieux définie que sur la TNT.
Mais alors là pour le son, ça n'a rien à voir ni avec la TNT ni avec Arte France car les oreilles des mélomanes allemands étant nettement plus exigeantes que celles des téléspectateurs français qui trouvent très bon le son qualité mp3, on saisi tout de suite ce qu'un débit audio de 384 kbits/s apporte comme bonheur musical à l'auditeur.
On entend nettement l'attaque d'archet d'Anne Sophie et on ne confond plus le chant d'une clarinette avec celui d'un aubois, que du bonheur je vous dit et je vais bien dormir cette nuit.

Mélomane et téléspectateur français sont décidément antinomique, tout le monde s'en fout mais ça soulage de l'écrire.

JM, j'ai découvert Anne Sophie en 1987, dans l'interprétation du même concerto, dirigée par Karayan, au philarmonique de Berlin.
Elle avait je crois 14 ans lorsqu'elle l'a enregistré...
Tu as raison, cette fille est un ange, et les larmes me montent aussi aux yeux à la seule évocation du souvenir de cette première écoute.
Depuis, j'ai collectionné ses enregistrements, que j'écoute toujours avec le plus grand plaisir, et ma pensée va paraitre étrange, lorsque j'ai besoin d'émotion...
Par contre, à la mort de Karayan, elle s'est un peu cherchée, a essayé de se démarquer dans quelques fantaisies de virtuosité qui n'ont pas toujours été du meilleur effet (j'ai notamment une version des 4 saisons que je préfère oublier, l'influence de Nigel Kennedy se fait sentir...)
Elle est tombée dedans toute petite, sa maman était je crois pianiste, mais après un début au piano à 3 ans, elle a préféré le violon parce qu'elle "fabriquait ses notes..."

De plus, elle est vraiment un régal pour les yeux !

J'ai une bonne chaine, que je n'échangerai pour rien au monde : ampli hybride, la platine qui va avec, et 2 super enceintes bretonnes... le super pied pour moi !

Si tu ne l'as pas, ce qui m'étonnerait, achète le même concerto, mais de Brahms... le même plaisir !!!

J'ai l'enregistrement du concerto pour violon de Beethoven avec Anne Sophie sous la direction de Karajan, c'est un microsillon que je vais me passer cet après midi puisqu'il va pleuvoir.

Le son analogique c'était quand même superbe dans les ligatures montantes à l'attaque de l'archet, on entend le souffle du frottement ce que la précision diabolique des enregistrements numériques a bien du mal à restituer dans sa douceur ténue.

De toute façon aujourd'hui avec la musique bouillie pour chat du mp3 qui est devenue le menu unique, on ne sait plus faire la différence entre un violon d'études pour élève de première année de conservatoire et le stradivarius d'Anne-Sophie.
Tiens, voilà ce que je vois depuis le fauteuil dans lequel je suis écroulé pour écouter Anne-Sophie :

Oui, JM, les violons ont une âme. D' autres instruments aussi. Et j' inclus même des instruments très "populaires", si l' on peut dire.... Comme la cabrette. Notre cornemuse auvergnate. Bien sur que ça n' a pas de rapport, enfin pas beaucoup avec cette merveilleuse dame du violon. mais l' instrument n' est jamais que l' "instrument"utilisé par l' artiste. Et il ne fait que transcrire son talent. Alors oui, certains instruments ont des qualités que d' autres n' ont pas. Ils traduisent le talent d' un ouvrier, entendez ici l' auteur d' une oeuvre.
Bien sur, quand un interprète d' exception s' exprime à travers un instrument d' exception, le résultat ne peut être qu' exceptionnel.
Je vous félicite les copains d' avoir conservé une telle oreille. Une oreille qui vous permette de détecter les positions de l' archer sur l' instrument. Pour ma part, c' est de l'histoire ancienne, cette ouie là. Les chasses de vapeur, les tirs dans la tourelle des AM, les bruits industriels de toutes sortes ont eu raison de mes plats à barbes. Autrefois, je suivais plusieurs conversations à la fois; maintenant j' ai bien du mal à en suivre une seule pour peu qu' il y ait un peu de bruit autour.

MEDRANO a écrit:
Je vous félicite les copains d' avoir conservé une telle oreille. Une oreille qui vous permette de détecter les positions de l' archer sur l' instrument. Pour ma part, c' est de l'histoire ancienne, cette ouie là. Les chasses de vapeur, les tirs dans la tourelle des AM, les bruits industriels de toutes sortes ont eu raison de mes plats à barbes. Autrefois, je suivais plusieurs conversations à la fois; maintenant j' ai bien du mal à en suivre une seule pour peu qu' il y ait un peu de bruit autour.

Malheureusement je n'ai pas conservé mes oreilles d'antan même sans avoir jamais été soumis au bruit des AM ni trop longtemps aux ambiances bruyantes des ateliers.
Les cellules ciliées qui tapissent ma choclée gauche se sont partiellement syndiquées et toutes celles qui résonnent au delà de 3500 Hz se sont fait porter pâles définitivement ce qui fait que mon système d'audition gauche fonctionne en mode filtré passe bas.
Du côté droit c'est plutôt un système avec filtre passe haut qui atténue fortement les fréquences inférieures à 250 Hz.
Quand j'ai constaté les dégâts après une quasi surdité subite révélée au cours d'un crapahut en altitude  j'avais même un décalage tonal d'au moins 200 Hz entre l'oreille gauche et l'oreille droite, en gros Mozart et Johnny même musique, l'horreur absolue.
Je me suis fait appareiller l'oreille gauche pour corriger autant que faire ce pouvait l'énorme déficit de niveau jusqu'à 35 dB à 1000 Hz, ce qui est énorme, et je me suis astreint à réécouter de la musique, beaucoup de musique, et à porter mon appareil du lever au coucher.

Et bien je dois dire que le cerveau est un truc remarquable qui sait réapprendre et trouver des voies de contournement pour reconstituer, le moins mal possible, des capacités de restitution sonore que l'on pouvait croire à jamais disparues.

Au bout de deux ans l'équilibre tonal droite gauche était rétabli, le diapason vibre à la même hauteur pour chaque oreille, et petit à petit j'ai récupéré une localisation spatiale stéréo qui s'était considérablement amoindrie.

En gros, pour l'écoute musicale j'ai retrouvé une bonne partie du plaisir ancien tout sachant que, plafonnant à 11500 Hz pour l'oreille droite, je ne pourrai jamais plus capter les harmoniques de rang supérieur qui font toute la richesse et le velouté de certains instruments.

On ne peut pas être et avoir été en même temps mais à force d'obliger mon cerveau à se rééduquer j'ai retrouvé une écoute musicale heureuse.

Maintenant, tout comme tu le racontes et malgré l'aide d'un appareil numérique qui sait théoriquement ajuster les niveaux sonores en fonction du niveau de bruit moyen environnant et privilégier les fréquences propres à la parole, j'ai le plus grand mal à suivre plusieurs conversations en même temps voire une seule parfois dans une ambiance bruyante, certains phonèmes chuintant passant très mal le barrage de mes cellules ciliées syndiquées et en grève permanente.

Mais bon, dès cet été, quand le trou noir créé par le CERN aura avalé la planète, je n'aurai plus jamais mal aux dents.    

Aucon problème pour moi avec mes pavillons... un murmure à 300 mètres...
Mais oui, JM, l'adaptation toute entière du corps humain implanté est stupéfiante.
Depuis septembre, la bécane qui fait battre ma pompe aspirante et refoulante remplit son office.
Au cours des premiers mois, j'avais l'impression que ça fonctionnait bien, mais comme les anciens turbos de voiture, qui démarraient brutalement avec un temps de retard.
Petit à petit, l'adaptation s'est faite, et j'arrive (si je suis occupé, et pense à autre chose qu'à ma petite personne), à l'oublier totalement.
Merveilleux, non ?

Dan, lors de mon séjour dans tes contrées, j'ai acheté un CD complet de cabrette, pour sonoriser mon film... c'est très bien, la cabrette, mais franchement, je préfère Anne Sophie...
J'ai préféré le silence du sommet du puy Mary...

Regardes sur le graphique ci-dessous l'étendue du désastre acoustique :
Je suis appareillé depuis début 2004 et la courbe de l'oreille gauche (violet) a été remontée jusqu'à la bleue clair représentant l'oreille droite.

Le dernier contrôle fait fin 2007 montre une légère amélioration de l'audition des deux côtés.
L'audioprothésiste ne pouvant pas m'expliquer scientifiquement les raisons de ce phénomène nous nous sommes mis d'accord pour estimer qu'il fallait considérer qu'il s'agissait d'une manifestation miraculeuse sans déplacement circonstancié de l'oreille à la grotte de Massabielle et que pour que ce miracle miraculeux continue son petit bonhomme de chemin de miracle il n'était pas avisé de chercher une autre explication.

À chaque visite mon audioprothésiste est tout content de pouvoir s'étendre en long et en large sur le fonctionnement de tous ses appareils car, m'a-t-il dit, je suis son seul client ayant jamais manifesté un quelconque intérêt réel pour les techniques qu'il utilise et dont il est très fier.

Vraiment très intéressant, JM, et quelque peu rassurant aussi.
Les dégâts étaient considérables, et pouvaient laisser augurer d'une triste fin pour ton audition.
Bravo en tout cas pour le travail personnel que tu as fourni, et les résultats que tu as obtenus.
La vie sans musique, je ne peux même pas y penser...
D'après ce que tu nous dis, j'ai l'impression que tu apprécie les romantiques et les classiques... tu n'as pas fouillé du côté des baroques ?...même un peu plus avant ?
Essaie Kapsberger, et dis moi ce que tu en penses : luth et théorbe, c'est pas mal non plus...

Je ne limite pas mes écoutes aux romantiques même si j'ai quelques difficultés à apprécier les compositeurs contemporains.
Par exemple si j'ai fini, en me forçant au départ à apprécier pratiquement toutes les œuvres de Shostakovitch j'ai beaucoup plus de mal à tenir longtemps à l'écoute de compositeurs comme Luciano Berio et sa musique électroacoustique ou Pierre Boulez et son ensemble intercontemporain ou même le plus ancien Olivier Olivier Messiaen et ses ondes Martenot.

Même en me forçant je n'arrive pas à apprécier vraiment les derniers avatars de la musique contemporaine.

À l'autre extrémité de l'échelle du temps, j'ai un peu du mal aussi à remonter avant les Josquin Des Prés, Claudio Monterverdi ou Palestrina car je manque trop de repères.
C'est d'ailleurs tout le problème de la culture musicale autodidacte qui comporte beaucoup de lacunes.

Je n'aime moi non plus pas du tout les contemporains, qui agressent mes oreilles...
Par contre, plus c'est ancien...
Je déclare toujours n'avoir aucune culture musicale. D'après mes proches, c'est un peu outrancier, mais c'est ainsi que je le ressens.
J'écoute avec mes tripes : j'aime ou je n'aime pas, c'est aussi simple que ça.
Il en a toujours été ainsi, et c'est mon épouse qui m'a fait découvrir l'existence des courants de pensée...
C'est ainsi que j'ai découvert que je préférais l'époque baroque...